Newsletter Orkyn' - Avril 2024
Un facteur de risque cardio-vasculaire : le déficit immunitaire commun variable
Par Pr Louis-Jean COUDERC
Common variable immunodeficiency-an independent risk factor for atherosclerotic cardiovascular diseases.- Mattila J. et al. Front. Cardiovasc. Med 10 :1289675. - doi 10.3389/fcvm.2023.1289675
L’athérosclérose, cause de la plupart des maladies cardiovasculaires, est considérée comme une inflammation chronique des vaisseaux dont les facteurs de risque sont bien connus : hypercholestérolémie, diabète, tabagisme, hypertension, facteurs génétiques. Les infections aiguës sont également connues comme facteurs de risque de maladies cardiovasculaires. Les malades atteints de déficit immunitaire commun variable (DICV) ayant des infections anormalement fréquentes ainsi que des complications auto-immunes, pathologies associées à de l’inflammation, il est donc logique d’étudier si les patients atteints de DICV ont une incidence accrue de maladies cardiovasculaires.
C’est ce qui a été réalisé par une équipe finlandaise. Elle a étudié rétrospectivement à partir d’un système informatique régional de recueil des données de santé, les caractéristiques de 83 malades avec DICV qui ont été comparées à celles de 830 témoins indemnes de DICV appariés sur le sexe et l’âge. Ont été pris en compte les diverses maladies cardiovasculaires d’origine athérosclérotique y compris cérébrale, les facteurs classiques de risque vasculaire, et l’existence d’un traitement substitutif par immunoglobuline.
Les malades avec DICV avaient une incidence accrue de coronaropathie (13,2% vs 6,05%, OR 2,4), de pathologie vasculaire périphérique (9,64% vs 0,85%, OR 12,5), sans différence significative des pathologies cérébrales. Globalement l’incidence des pathologies cardiovasculaires était de 21,69% parmi les malades avec DICV vs 9,55% chez les témoins, soit un OR de 2,6.
Après une analyse de régression logistique ajustée sur l’âge, le sexe, le tabagisme, l’hypertension, la CRP, l’existence d’une maladie auto-immune, le DICV demeure un facteur de risque cardiovasculaire ( OR=2,00, 95%, IC : 0,90-4,40, p=0,002).Il n’y avait pas de différence entre les 2 groupes de malades de leur bilan lipidique et de leur taux d’hémoglobine glycosylée. Une analyse en sous-groupe n’a pas mis en évidence de différence statistiquement significative entre les malades avec DICV traités ou non par immunoglobulines.
Les malades avec DICV avaient une fréquence plus élevée de maladies auto-immunes que les témoins (OR : 5,5, p < 0,001) mais l’analyse multivariable a montré que le risque accru d’athérosclérose n’est pas simplement en rapport avec la fréquence accrue de maladies auto- immunes.
En conclusion, cette étude qui est la première à comparer le risque cardiovasculaire entre des malades avec DICV et des malades indemnes, montre que le DICV est un facteur de risque cardio- vasculaire indépendant des facteurs classiques. Les cliniciens doivent donc prêter attention à ces pathologies et à la prévention de leurs facteurs de risque classiques connus. Le rôle de l’inflammation induite par les infections, plus fréquentes chez les malades avec DICV, demeure à préciser ainsi que le rôle du traitement substitutif par immunoglobulines.